Quand les vitraillistes s’inspirent des peintres
‘Zoom’ est une nouvelle catégorie parmi les post que je publie sur ce site. Le but est de décrire et d’analyser un vitrail, choisit pour son caractère remarquable, sa singularité, son histoire ou sa beauté. Ce premier post ‘Zoom’ est consacré à un vitrail de l’atelier L. Lobin (encore lui!), que j’ai découvert cet été dans la cathédrale Saint-Louis de La Rochelle.
Depuis toujours, artistes et artisans ont souvent travaillé en étroite collaboration. Et le métier de vitrailliste ne déroge pas à la règle. Certains chefs-d’œuvre d’illustres peintres ont servi de base ou d’inspiration pour les Maîtres verriers d’antan : Raphaël, David, Ingres, Muscha, Sir Edward Burne-Jones, Chagall, Cocteau… Et aujourd’hui encore, les gros ateliers font appels à des artistes pour confectionner les cartons qui serviront de base à la confection des vitraux. Saint-Michel, l’un des sept archanges majeurs des 3 principales religions a souvent été une source d’inspiration pour de nombreux artistes. Son image a ainsi été reproduite en peinture, en statues ou en gravures. L'image la plus connue est celle qui le représente sous la forme d’un ange armé d’un glaive, habillé d’une armure et terrassant un dragon (Satan).
L’atelier Lobin dont je vous ai raconté l’histoire dans un précédent post, a confectionné plusieurs vitraux représentant Saint-Michel. Le plus grand et le plus majestueux d’entre eux se trouve dans la cathédrale Saint-Louis de La Rochelle. Deux autres ateliers y ont également créé les vitraux : l’atelier d’Émile Hirsch à Paris et l’atelier d’Antoine Lusson au Mans.
À l’inverse des autres vitraux présents dans l’édifice et colorés à l’extrême, les créations de Lucien Léopold se démarquent nettement. En prenant le parti de ne peindre qu’avec des grisailles brunes, quelques touches de jaune d’argent, et de disposer les peintures sur de grandes surface vitrées blanches, il présente ainsi une œuvre visuelle élégante et d’une grande sobriété.
Pour le vitrail représentant Saint-Michel, Lucien Léopold s’est directement inspiré d’une toile de Raphaël datant de 1518. Cette œuvre a été commanditée par le pape Léon X pour être offert à François Ier, à l'occasion du mariage de Laurent II de Médicis, neveu du pape. Elle représente l’Archange Michel armé d’une lance, le visage souriant et se tenant debout, le pied posé sur le dos d’un démon ailé et grimaçant. La peinture de Lucien Léopold est assez fidèle à la toile de Raphaël : même posture, même décor, seuls quelques petits éléments ont été modifiés : la forme des rochers diffère légèrement, des flammes ont été rajoutées sur la partie gauche du vitrail, et Lucien Léopold a adjoint quelques touches de couleurs à l’émail, sur les cornes et la queue du Démon.
Je vous laisse le soin d’admirer au plus près la finesse des détails et la douceur des modelés, qui démontre une nouvelle fois tout le talent et la grande maîtrise du geste des Lobin père et fils en matière de peinture.